Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
3.300 milliards de dette pour la France, un budget impossible à boucler, des finances publiques à sec. Tout le monde devrait se serrer la ceinture, à commencer par les collectivités territoriales. Visiblement, le message n’a encore pas bien ruisselé.
Une tempête secoue le microcosme bordelais. Une tempête dans un verre d’eau, mais d’un genre extrêmement coûteux. La Régie de l’Eau Bordeaux Métropole a lancé un concours pour concevoir une carafes en verre destinées à promouvoir l’eau du robinet. Des étudiants des Beaux-Arts l’ont dessinée. Reste à la faire fabriquer. Un appel d’offre a été lancé le 19 avril pour... Un demi million d’euros. 448 000 euros TTC précisément, dont 50 000 euros pour le seul moule de la précieuse carafe. Que d’euros, que d’euros, comme on dit. Et quelle ironie quand on sait que le maire de Bordeaux Pierre Hurmic a installé en novembre deux banderoles sur sa mairie pour protester contre les coupes budgétaires de l’Etat. Visiblement les caisses locales ont encore un peu de liquide.
Comment la métropole justifie-t-elle une telle dépense ?
Selon vice-présidente écologiste de la Métropole, il s’agit d'un projet « utile et symbolique » , qui va commencer en janvier 2026 pour courir sur quatre ans. L’objectif est de « réduire les bouteilles en plastique, qui coûtent 200 fois plus cher que l’eau du robinet et qui polluent ». Les fameuses carafes seront distribuées aux restaurants, aux cafés, aux foyers, afin de les inciter à servir de l’eau du robinet – des fois qu’ils n’aient connaissance du type de contenant qu’on peut utiliser. Certaines carafes seront vendues. Il va falloir en écouler un paquet pour éponger la dépense.
Les élus d’opposition s’étranglent.
Notamment un élu modem qui a dévoilé publiquement le pot-aux roses – un peu tard, puisque certains membres de son groupe politique ont voté le projet. Il dénonce la dilapidation de l’argent public dans des opérations de communication et de marketing, alors que la priorité devrait être la qualité de l’eau et des tarifs accessibles. C’est vrai que produire un dispendieux gadget en verre, au bilan carbone lourd, pour promouvoir un geste d’économie écologique, ça paraît un peu contradictoire et pas exactement décroissant.
L’élu en colère brandit un argument choc : le demi million d’euros du budget carafes est supérieur aux 400 000 euros consacrés annuellement par la métropole au chèque-eau pour les publics le plus précaires. Le superflu a totalement noyé l’essentiel.
D’autant que la métropole de Bordeaux n’a pas bien géré ses finances ces dernières années...
Les dépenses ont tellement augmenté que pour boucler le budget 2025 de 2,2 milliards d’euros et faire face à ses investissements, elle doit massivement emprunter. La dette atteint presque 2 milliards, 25% de plus qu’il y a un an. Foutu pour foutu, autant commander pour un demi million d’euros de carafes, c’est une goutte d’eau dans ce puits sans fonds d’argent public mal géré. C’est pas cher, c’est le contribuable qui rince.